
Observons notre monde qui pousse tant à dématérialiser et à pousser les limites du virtuel dans toutes ses dimensions. Toutes les formes de communication numériques confèrent à nos relations humaines des proximités, des interactions qui amenuisent les contraintes de l’espace et du temps. C’est fabuleux et, dans le même temps, c’est prodigieusement confrontant. J’appartiens à cette génération où la poignée de main avait une valeur significative au même titre que le bonjour et le fameux au revoir. Le covid a accentué le phénomène en poussant les gens à se retrancher derrière les masques et une gestuelle minimale. Aujourd’hui, notre relationnel en porte les traces. Les gestes ont été mis en sourdine, dont la fameuse poignée de main à laquelle j’étais très attachée. Elle revient peu à peu mais reste encore discrète dans ses manifestations. Ce geste appartenait à une vieille coutume qui relie deux êtres, souvent éloignés dans leur univers. Elle remonte à des temps anciens (depuis l’Antiquité grecque), où elle était gravée sur des stèles comme un symbole discret mais puissant. Ce geste a traversé les âges, portant en lui une promesse de paix, de confiance ou d’entente. Au Moyen-Âge, les chevaliers serraient la main pour montrer qu’ils n’avaient pas d’armes, que leur intention était pacifique, que leur épée restait au fourreau.
Aujourd’hui, cette même poignée de main conserve une signification culturelle, bien que transformée, comme un langage codé, révélant la personnalité de celui ou celle qui la tend. Ainsi, Il existe des poignées de main musclées, molles, mouvementées, moites, du bout des doigts ou toute la paume en contact. C’est cette dernière qui touche au cœur de l’autre car elle est gage de confiance : une poignée de main contenante, paisible, neutre, comme pour sceller un pacte d’écoute et de bienveillance. Elle évoque le respect mutuel, accompagnée de regards francs qui ne trompent pas. A travers ce simple geste se tisse le lien fragile mais précieux de notre humanité partagée. Bien d’autres gestes font écho de cela : le sourire, les inclinations dans d’autres cultures… Au fond, c’est dans ces gestes simples que se révèle notre manière de faire société avec l’autre. Je nous souhaite de réapprendre les gestes de confiance indépendamment de nos modes virtuels et nos usages sociétaux.
©Gabrielle Fourcault
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