Rien de plus difficile que les tournants qui défient nos trajectoires. Dans le balancier de nos introspections, dans les confidences d’amis, de proches, de voisins ou de gens que l’on croise dans le quotidien, les mouvements de la vie nous traversent de toutes parts. Que ce soit dans la vie personnelle ou professionnelle, les choses les plus difficiles sont celles que l’on sait incontournables au moment où l’urgence du corps vous y contraint, au moment où l’impasse des réflexions se heurte au principe de réalité. Vous avez beau avoir déployé toute l’agilité d’écureuil dont vous étiez capable, avoir remonté les manches et mis les mains dans le cambouis, les petits pas de côté et les grandes enjambées vous rappellent que les vérités ne se laissent pas amadouer par vos petits compromis intérieurs. C’est que nos pieds, au bord du chaos, ouvrent des espaces inattendus, hors des sentiers habituels, après lesquels nous courons pourtant tant ils nous rendent vivants et riches. Ce que j’évoque ici, ce sont les grandes décisions nécessaires qui nous obligent à ne plus se voiler la face, à regarder droit devant soi malgré ce quelque chose en nous qui se fige à l’idée de passer à l’action. C’est comme ce vol en avion où vous êtes attendu, le parachute bien ajusté, à embrasser le vide, malgré ce sentiment du vertige qui vous cloue sur place. Selon la mythologie grecque, le Chaos est cet espace primordial, cette matrice d’où jaillit la lumière, la naissance de tout ce qui advient. Alors, ce jour, j’ai une pensée particulière à tous ceux qui doivent puiser dans leurs forces pour bâtir un nouveau chemin voire même tout reconstruire, à ceux qui doivent mettre fin à une relation ou encore effacer des années d’efforts pour tourner une page, à ceux qui renaissent de leurs cendres pour aimer à nouveau, à ceux frappés par la maladie et qui s’ouvrent aux métamorphoses nécessaires, à ceux confrontés à la défection mettant en berne un projet ou une cause, à ceux traversés par un deuil et qui savent que rien ne sera plus jamais comme avant. J’ai le souhait que les mouvements de la vie deviennent une quête lumineuse, à leur juste mesure, guidée par cette étincelle d’espoir qui, même dans l’incertitude obscure, ne demande qu’à briller.
©Gabrielle Fourcault
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